SÉNÉGAL : une menace économique pour les éleveurs de Casamance à cause du vol de bétail transfrontalier

 Rédacteur : Seydou Tamba CISSE

Sédhiou / Sénégal

Dans la région de Sédhiou, au sud du Sénégal en Casamance, l’élevage fait partie intégrante des activités économiques des habitants de cette terre d’agriculture. Cependant, le phénomène de vol de bétail transfrontalier entre le Sénégal et la Guinée-Bissau a coûté la vie à plusieurs éleveurs et voleurs. Malgré les efforts du comité de vigilance contre le vol de bétail, la porosité de la frontière entre les deux pays a permis à ce fléau de prendre une tournure inquiétante. En conséquence, la disponibilité de la viande, du lait et l’emploi des jeunes sont gravement menacés dans la région. La correspondance de Seydou Tamba Cissé.

L’inquiétude des ménages, des consommateurs, les éleveurs et l’état du Sénégal s’agrandit de jour en jour en raison de la récurrence du vol de bétail entre le Sénégal et la Guinée Bissau. Les voleurs qui arrivent armés sur le territoire sénégalais, sèment la terreur avant d’emporter les bêtes. Souleymane Mansaly, éleveur dans la commune de Samine, département de Goudomp, region de Sédhiou retrace le film de l’enlèvement de son troupeau

« C’était vendredi 09 mai 2014, les voleurs sont venus, ils m’ont trouvé à la rizière. J’étais assis mais à ce moment-là je ne m’attendais pas à ce qu’ils arrivent. Tout à coup, ils sont arrivés en plein jour et ils m’ont dit en créole ‘nous sommes venus chercher les vaches’ et j’ai répondu, ‘voilà les vaches’. Ils m’ont dit ‘tiens on y va’. Ils m’ont neutralisé. Moi j’étais devant les vaches et eux derrière, on courait pour les conduire en Guinée. J’ai réussi à fuir à travers les vergers de Cajou, mais ils ont emmené 67 têtes de bœufs. Nous en avons retrouvé seulement 24 après la recherche des autorités sénégalaises. »

L’ampleur du Phénomène de vol de bétail dépasse le président du Comité de Vigilance Contre le Vol de Bétail Jean Séraphin Mane qui rappelle que du jeudi 15 janvier au samedi 09 décembre, qu’ils ont enregistré le vol de 373 petits ruminants (chèvres et moutons), et seulement 55 ont été retrouvés. Pour les bovins, sur 584 têtes volées, seulement 138 ont été récupérées.

Plusieurs facteurs expliquent la récurrence du vol nous dit Ibou Diallo Sadio, Maire de Djibanar

« La situation est liée à notre grande proximité à la frontière bissau-guinéenne. Le chef-lieu de village de la commune est à 12 kilomètres de la frontière, et notre dernier village, Adéane Nding, n’est même pas à un kilomètre. Cette porosité de la frontière complique la lutte contre le vol de bétail. »

Amadou Goudiaby, Sous-Préfet de l’arrondissement de Djibanar soutient que le phénomène a complétement changé de paradigme. Dit-il « Le phénomène a évolué : hier, c’était un vol de subsistance ou destiné aux cérémonies en Guinée. Aujourd’hui, c’est un vol destiné au commerce. C’est devenu un vol commercial. »

Beaucoup d’éleveurs, père de famille sony tués par les voleurs qui sont armés et échappes à la surveillance des forces de défense et de sécurité. Jean Séraphin Mané, Président du Comité de Vigilance Contre le Vol de Bétail, a été victime d’une attaque des voleurs, nous explique comment les faits se sont déroulés..

« Lors d’une poursuite entre Koussy (Sénégal) et Sidif (Guinée), ils ont tiré sur moi. J’ai été atteint par trois balles : à la cuisse droite, la cuisse gauche et près du genou. J’ai été opéré, mais certaines balles sont encore à l’intérieur. »

Bilan des affrontements entre éleveurs sénégalais et voleurs en provenance de la Guinée Bissau varie d’année en nous informe Amadou Goudiaby, Sous-Préfet de l’arrondissement de Djibanar.

« En 2019, nous avons eu deux blessés graves au Sénégal. En 2020, un mort en Guinée-Bissau ; en 2021, deux morts en Guinée-Bissau ; en 2022, un mort en Guinée ; et en 2023, deux morts en Guinée-Bissau. Souvent, les voleurs sont armés et tirent les premiers. »

Au-delà des pertes en vies humaines, l’impact du vol se manifeste sur d’autres aspects de la vie de la communauté

Jean Louis Benoit Gomis, Adjoint au Chef du Service Départemental de l’Élevage de Goudomp rapporte que le cheptel se rétrécit, de nombreux éleveurs abandonnent. Cela s’impacte sur la disponibilité en viande dans le département. Même le nombre de bouchers et le nombre de têtes tuées par jour a diminué. La production de lait est très faible, surtout comparée à la région de Kolda.

Les impacts négatifs du vol de bétail transfrontalier sur la région de Sédhiou, soulignant la nécessité de mesures plus efficaces pour sécuriser les éleveurs et leurs moyens de subsistance et ces derniers réclament un renforcement de la sécurité sur la frontière.

Check Also

Côte d’Ivoire : Un influenceur burkinabè partisan des autorités arrêté à Abidjan

Alain Christophe Traoré, alias Alino Faso, un influenceur burkinabè connu pour son soutien aux autorités …