La chute d’Assad : un revers stratégique majeur pour l’Iran

Rédaction: Dr. Dabou Sakira

Depuis les événements tragiques survenus le 7 octobre, l’« axe de la Résistance » apparaît en net recul, dépassé tant sur le plan stratégique que diplomatique et militaire. Pour les adversaires de Téhéran, l’effondrement du régime de Bachar el-Assad constitue une opportunité décisive pour fragiliser un pouvoir iranien déjà en difficulté. Parmi les grandes victimes collatérales du développement de la situation politique en Syrie, l’Iran figure sans doute en première ligne.

Un modèle de projection de puissance en péril

La République islamique voit aujourd’hui sa stratégie régionale vaciller au Levant. Pendant des années, Téhéran a consolidé son influence en misant sur des alliés non étatiques, au premier rang desquels le Hezbollah, fer de lance de ce réseau. La Syrie, sous la présidence d’Assad, constituait le pivot étatique de cette architecture stratégique, pour la préservation de laquelle l’Iran a investi d’importantes ressources financières et humaines, afin d’assurer l’exportation massive du crédo chiite duodécimain.

Face à l’effondrement soudain du régime baasiste, le débat fait rage au sein de l’appareil sécuritaire iranien, notamment parmi les Gardiens de la Révolution. Deux lignes s’opposent : faut-il accepter cette perte et en limiter les conséquences, ou bien redoubler d’efforts pour préserver coûte que coûte une influence en déclin ?

Après treize années d’engagement militaire et politique en Syrie, ce revers constitue un coup dur pour la République islamique, d’autant plus qu’il menace directement son dispositif de soutien au Hezbollah libanais, très affaibli après la neutralisation successive de ses deux SG. Pour Téhéran, la survie du régime d’Assad ne relevait pas uniquement d’une stratégie régionale, mais bien d’une question de sécurité nationale vitale dans un pays secoué par une montée fulgurante de la grogne sociale.

Un parallèle inquiétant avec la situation intérieure iranienne

Dans les cercles du pouvoir iranien, la chute brutale du régime syrien alimente une crainte plus large sur les causes profondes de cet effondrement. Tandis que certains, à l’instar du guide suprême Ali Khamenei, imputent cette défaite à un manque de détermination du régime syrien, d’autres estiment que Bachar el-Assad a échoué à réduire le fossé entre l’État et la société.

Ce constat fait écho aux propres fragilités du régime iranien. Certes, l’Iran ne connaît pas une situation identique à celle de la Syrie, où une minorité alaouite exerçait le pouvoir sur une majorité sunnite. Toutefois, le clergé chiite au pouvoir à Téhéran reste lui aussi minoritaire face à une population largement sécularisée et de plus en plus critique à l’égard du système. La répression et la corruption alimentent une contestation croissante, exacerbant le risque d’un scénario comparable à celui observé en Syrie.

Alors que la chute d’Assad rebat les cartes de l’influence iranienne au Moyen-Orient, une question demeure : l’Iran saura-t-il tirer les leçons de cet échec, ou assistera-t-on, à terme, à une remise en cause plus profonde du régime des ayatollahs ?