Plainte contre l’État français : le fils d’un tirailleur sénégalais tué à Thiaroye réclame justice

Rédaction : Widad WAHBI

Plus de 80 ans après le massacre de Thiaroye, survenu en décembre 1944 au Sénégal, Biram Senghor, fils unique d’un tirailleur sénégalais exécuté par l’armée coloniale française, engage une action judiciaire contre l’État français. Le 25 juin, son avocat, Me Mbaye Dieng, a déposé plainte au tribunal judiciaire de Paris, accusant la France de recel de cadavre et d’obstruction à la vérité.

M’Bap Senghor, soldat ayant combattu pour la France durant la Seconde Guerre mondiale, aurait été abattu alors qu’il revendiquait, comme ses camarades, les soldes impayées à leur retour d’Europe. D’abord déclaré « non rentré » puis faussement qualifié de déserteur, son décès ne fut reconnu officiellement qu’en 1953. Son fils, aujourd’hui âgé de 86 ans, affirme ne pas savoir où se trouve la dépouille de son père, et dénonce le silence des autorités françaises : « Le ministère des Anciens combattants sait exactement où ils sont enterrés. »

Le massacre, officiellement limité à 35 morts par les autorités de l’époque, est estimé à plusieurs centaines de victimes par des historiens. À ce jour, le lieu de sépulture des tirailleurs exécutés demeure incertain. En juillet 2024, six d’entre eux, dont quatre Sénégalais, ont été reconnus « morts pour la France », parmi lesquels M’Bap Senghor.

L’avocat de la famille pointe une dissimulation volontaire des faits. Il rappelle que l’article 434-7 du code pénal français punit toute dissimulation de cadavre consécutive à des violences. Il reproche également à l’État français de restreindre l’accès aux archives et de faire obstruction à la manifestation de la vérité.

Des recherches archéologiques menées récemment à Thiaroye ont permis la découverte de squelettes humains portant des impacts de balles, renforçant la thèse d’une exécution massive. Le gouvernement sénégalais, engagé dans la recherche de vérité, accuse la France de retenir des documents d’archives clés.

En dépit d’une déclaration de l’ex-président François Hollande en 2014, affirmant avoir transmis toutes les archives liées à Thiaroye, plusieurs zones d’ombre demeurent. Paris affirme avoir « fait tout ce qu’elle devait faire » et indique que les archives militaires et coloniales sont désormais ouvertes. Pour Biram Senghor, cette reconnaissance reste insuffisante : « Qu’elle me paie. »

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