« Même les oiseaux ont fui » : quand les jihadistes vident le cœur des villages maliens
Rédaction : Widad WAHBI
Dans le nord et le centre du Mali, des communautés entières disparaissent. Sous la menace des groupes jihadistes, les habitants sont accusés de collaborer avec les forces armées et sommés de quitter leurs terres. Ce phénomène silencieux, mais massif, redessine la carte humaine et culturelle du pays.
Chaque jour, à Niafunké, Soumaguel s’installe au bord du fleuve. Face à lui, de l’autre côté, son village d’enfance – ou plutôt ce qu’il en reste. « Je revois les anciens jouant au wali, les garçons courant après un ballon poussiéreux, les femmes lavant le linge sur la berge », raconte-t-il au téléphone, la voix nouée. Aujourd’hui, il n’y a plus rien. « Même les oiseaux ont fui », murmure-t-il.
Comme lui, des milliers de personnes ont été contraintes de fuir. Dans les régions de Tombouctou, Mopti, Gao ou Ségou, les groupes jihadistes imposent leur loi. Quiconque est soupçonné de collaborer avec l’armée – parfois pour un simple appel téléphonique ou une visite d’un soldat – est menacé d’exécution. La seule alternative : partir. Et vite.
Les villages se vident en silence, souvent de nuit. Les familles abandonnent leurs maisons, leurs récoltes, leurs bétails, leurs ancêtres. Dans certains cas, les écoles, les centres de santé ou les lieux de culte sont également visés. Une véritable épuration territoriale s’opère, sans qu’aucune statistique officielle ne mesure pleinement l’ampleur de la catastrophe.
Ce déplacement massif de populations provoque un double choc. D’abord humanitaire : les déplacés internes affluent vers des zones déjà précaires, accentuant la pression sur les ressources et les infrastructures. Ensuite, culturel : la désertification humaine efface des traditions, des langues locales, des savoir-faire communautaires.
« Le marché ne fonctionne plus, les cérémonies ont cessé, les chants ont disparu… », déplore un chef communautaire de la région de Mopti. « Même les morts sont sans sépulture, car plus personne n’est là pour les enterrer. »
Face à cette situation, l’État malien peine à réagir. L’armée, engagée sur plusieurs fronts, est souvent absente des zones les plus touchées. Quant aux organisations humanitaires, leur accès est restreint par l’insécurité et les entraves logistiques. Pendant ce temps, les groupes jihadistes renforcent leur emprise, imposant leur justice, leur fiscalité, leur version de l’ordre.
Dans ce contexte, les mots de Soumaguel résonnent comme un avertissement :
« Lorsqu’un village se vide, ce n’est pas seulement une terre que l’on abandonne, c’est une mémoire que l’on efface. »
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