Iran-Algérie-Polisario : l’alliance invisible qui étend ses tentacules en Europe

Rédaction: Africa eye

Dans « La Pieuvre de Téhéran », Emmanuel Razavi et Jean-Marie Montali dévoilent les rouages d’un axe stratégique entre Téhéran, Alger et le Polisario, transformant le Maghreb et la France en terrains de manœuvre silencieux pour le projet d’influence iranien.

Téhéran n’a jamais abandonné ses ambitions de peser sur le jeu mondial. Mais plutôt que de frapper frontalement l’Occident, la République islamique s’appuie désormais sur des relais discrets, des alliances inattendues, des terrains de crise pour installer son influence. L’Algérie et le Front Polisario deviennent ainsi des pièces centrales de ce dispositif, que les journalistes Emmanuel Razavi et Jean-Marie Montali documentent dans une enquête dense et percutante.

Car si Alger n’est pas un allié idéologique de Téhéran, elle se révèle un partenaire opérationnel de premier plan. Grâce à ses lignes aériennes, ses ambassades et son réseau diasporique, l’Algérie facilite les mouvements occultes, logistiques et financiers des services iraniens, notamment du redouté corps des Gardiens de la révolution et de sa branche extérieure, la force Al-Qods. Un partenariat de circonstance, forgé dans un rejet commun de l’influence occidentale, mais aussi dans une convergence tactique : affaiblir le Maroc, allié des États-Unis et d’Israël, tout en consolidant une présence en Afrique et en Méditerranée.

Le Polisario, dans ce jeu d’échecs, se transforme en levier asymétrique. Non pas pour des raisons idéologiques, mais parce que sa lutte contre le Maroc offre à Téhéran une porte d’entrée dans le Sahara, une passerelle vers le Sahel et un moyen de court-circuiter les monarchies du Golfe. Selon les révélations du livre, des cadres sahraouis sont formés par les instructeurs iraniens, tandis que des réseaux algériens servent de relais à la propagande pro-Hamas et pro-Hezbollah sur le sol français.

Mais le véritable atout de Téhéran reste l’instrumentalisation de la diaspora algérienne en Europe. Dans les banlieues françaises, sur les campus, au sein d’associations militantes, le discours antisioniste, le soutien à la cause palestinienne et le rejet de l’Occident deviennent des vecteurs de pénétration idéologique. Derrière ces causes, légitimes aux yeux de beaucoup, se cache parfois la stratégie patiente de la République islamique, qui tisse ses réseaux en profondeur dans la société française.

Razavi et Montali révèlent ainsi une France vulnérable : des associations qui relayent les mots d’ordre des mollahs, des universitaires qui banalisent le discours anti-occidental, des influenceurs qui deviennent des relais de propagande sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas un complot fantasmé : c’est un travail de sape méthodique, visant à fragiliser les sociétés européennes tout en renforçant l’empreinte de Téhéran.

À travers une enquête alimentée par des témoignages d’ex-agents de renseignement et des documents inédits, « La Pieuvre de Téhéran » éclaire un axe Iran–Algérie–Polisario qui, sous couvert d’anti-impérialisme, devient un outil de déstabilisation ciblant le Maghreb, le Sahel et l’Europe. Une stratégie silencieuse, mais redoutablement efficace, qui révèle à quel point le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Europe sont désormais liés dans les nouvelles guerres d’influence.