Le paysage géopolitique du Sahel : fin de la suprématie algérienne, montée en puissance marocaine

Rédaction : Africa Eye

Dans un récent article, le magazine Jeune Afrique met en lumière des transformations significatives dans le paysage géopolitique de la région du Sahel, marquées notamment par le recul du rôle traditionnel de l’Algérie en tant que puissance régionale et médiateur influent, face à l’essor croissant du Maroc, qui avance résolument pour renforcer sa présence.

Selon la revue, la diplomatie algérienne se heurte à des obstacles grandissants, notamment la détérioration des relations avec le Mali et le Niger, ce dernier refusant de s’engager dans les initiatives conduites par Alger, ce qui a considérablement amoindri le poids régional dont jouissait auparavant l’Algérie.

Ainsi, fin juillet dernier, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a proposé une médiation entre le gouvernement de Bamako et les Touaregs du nord du Mali, initiative qui n’a cependant rencontré que peu de chances de succès concret. François Soudan, rédacteur en chef de Jeune Afrique, analyse que « l’offre algérienne était davantage une manœuvre politique qu’une véritable initiative sérieuse », soulignant que les autorités maliennes rejettent toute médiation extérieure, en particulier celle de l’Algérie, accusée d’abriter plusieurs leaders rebelles et opposants, notamment le cheikh Mahmoud Dicko.

Ce rejet s’explique essentiellement par une divergence profonde dans l’approche : l’Algérie cherche à maintenir des relations équilibrées avec les Touaregs, craignant que le conflit ne déborde vers ses territoires du Sud riches en ressources pétrolières et gazières.

Le recul récent de l’Algérie s’est aussi manifesté par deux revers majeurs : le retrait du Mali de « l’Accord d’Alger » en janvier 2024, et le refus du Niger, en octobre 2023, d’une feuille de route politique civile proposée par l’Algérie. L’accord signé en 2015 à Alger a été pratiquement suspendu après l’adoption du « Pacte pour la paix » sous la houlette d’Ousmane Issoufi Maïga, ce qui a mis fin de facto au rôle d’Alger en tant que médiateur accepté par toutes les parties.

L’Algérie attribue ce déclin à des « influences étrangères hostiles » incluant « le Maroc, Israël et les Émirats », mais la réalité révèle aussi des facteurs internes, parmi lesquels une décennie d’isolement politique liée à la maladie de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika et au Hirak populaire, qui ont conduit à une vision algérienne du Sahel centrée sur sa fonction sécuritaire, au détriment d’une perspective d’intégration économique.

D’autre part, l’article souligne que le Maroc agit selon une vision globale et flexible, combinant soft power, intérêts économiques, liens religieux ainsi que coopération sécuritaire. L’auteur qualifie cette approche de « stratégie atlantique », visant à relier les États sahéliens enclavés à l’océan Atlantique, un projet ambitieux encore en grande partie discursif, mais porteur d’importantes implications géopolitiques.

Alors que les médiations algériennes butent, le Maroc semble avancer à grands pas pour bâtir une présence croissante au Sahel, tirant parti du vide diplomatique et des recompositions des alliances régionales, dans une course à l’influence appelée à s’intensifier dans les années à venir, conclut l’article.

 

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