Kenya entre ambitions numériques et réalité de la corruption

Rédaction : Omar kadir

Le Kenya, souvent présenté comme un moteur de l’innovation en Afrique et comparé à la Silicon Valley, s’est imposé comme un pôle d’attraction pour les capitaux et les grandes entreprises technologiques. Nairobi accueille désormais les sièges régionaux de groupes comme Safaricom, Microsoft et Google, séduits par la qualité des compétences locales et l’essor de la connectivité. Cependant, derrière cette image dynamique, la gouvernance des projets phares reste marquée par des irrégularités. L’exemple du Konza Technopolis, censé incarner la ville intelligente du futur, illustre ces dérives, avec des acquisitions foncières controversées et des contrats attribués dans des conditions opaques.

En parallèle, plusieurs scandales financiers ont révélé l’ampleur de pratiques frauduleuses dans les secteurs publics et privés. En 2023, le président William Ruto a annulé des accords d’une valeur de plusieurs milliards de dollars avec le conglomérat indien Adani, invoquant des irrégularités dans les procédures d’appel d’offres. Ce type de décision reflète une méfiance croissante envers des projets où la transparence est régulièrement mise en cause, tandis que les sanctions contre les responsables restent rares. Cette situation alimente la frustration d’une population qui peine à percevoir les retombées concrètes des investissements numériques.

Ainsi, la fracture entre discours officiels et réalité sociale s’accentue. Les manifestations de la jeunesse kényane en 2024, déclenchées par un projet de loi fiscale, ont mis en lumière le décalage entre les élites technocratiques et une majorité encore exclue des bénéfices de la transformation numérique. Pour que cette transition serve réellement l’intérêt général, des réformes structurelles en matière de gouvernance, de transparence et de responsabilité apparaissent indispensables, afin de garantir que les avancées technologiques profitent à l’ensemble des citoyens et non à une minorité privilégiée.